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Rachel M. Cholz partage son temps entre Genève, Paris et Bruxelles, où elle vit actuellement. Outre l’écriture de récits, elle écrit et crée des projets pour la scène et les arts numériques. En plaçant la langue au centre de la dramaturgie, elle se délecte des paradoxes du langage comme du Nail art dans le cambouis.

En 2010, elle décide d’entrer à l’École nationale supérieure des arts visuels de La Cambre à Bruxelles. Sa rencontre avec la capitale belge se fait, comme souvent, par diverses habitations temporaires, qui la conduisent à créer, avec d’autres, un atelier d’artistes dans une ancienne entreprise de ballons, sa chambre située dans l’espace des machines. Elle y installera ensuite un atelier de gravure.

À cette période, elle ne se concentre pas sur un champ artistique précis : écriture déjà, mais aussi performance, installation, gravure… Une approche sémiologique, cherchant à tâtons les paradoxes entre médium et langage. Elle se forme en parallèle à la régie lumière au Magasin 4, haut lieu de la culture punk-rock et des musiques alternatives. Elle voyage aussi beaucoup : Turquie, Inde, Mexique, France… Elle réalise ce qu’elle nomme son « premier travail d’écriture » en 2013, entre l’Arménie et la Géorgie, qu’elle parcourt en stop et en taxi. Elle dira de ce voyage :

« Ma rencontre avec un camionneur borgne, qui faisait un commerce de pierres, a été révélatrice de ce que j’ai fait là-bas. J’ai développé à travers un texte, une dualité corps-paysage, en parcourant toutes les ruines de l’Azerbaïdjan, en guerre avec l’Arménie, et les checkpoint qui nous laissaient rentrer dans le pays depuis le sud, pour des raisons commerciales. La cicatrice d’un pays comme de son propre visage. Me sont venus là mes premiers espaces de jeux en écriture : des géographies de la chair. »

Elle part régulièrement travailler en Suisse, en tant qu’éclairagiste pour plusieurs festivals de jazz. Elle achète une Ford Courrier, en fin de vie, qui lui fait dire qu’elle a « passé plus de temps en-dessous que dedans », les mains dans le cambouis, avec son oncle qui a un garage dans le jardin de sa grand-mère en banlieue lyonnaise.

« Mon rapport à la voiture, à la circulation, et aux non lieux qui les entourent, se retrouvent régulièrement dans mes récits : comme dans Octobre ma fortune, qui parle d’un accident de moto ; ou deux autres textes en cours d’écriture : un sur l’histoire d’un trafic d’essence et l’autre qui se déroule devant le périphérique de Charleroi où j’ai logé pendant une tour- née, la fenêtre de ma chambre à dix mètres du R9, ce ring surréaliste qui survole tout un pan de la ville. »

En 2015, elle déménage dans un nouvel atelier, ouvert avec d’autres auteurs, où sont organisés ponctuellement des évènements et des soirées lectures à travers des micros-ou- vert. Elle vit pendant plusieurs années entre Genève, Bruxelles — où elle reprend un master écriture à l’INSAS, l’Institut National Supérieur des Arts du Spectacle et des Techniques de Diffusion (Bruxelles) — et différentes résidences d’écriture en France et en Belgique.

Viennent ses premiers écrits pour le théâtre, dont Trois pour cent sauvages, qu’elle montera en 2020, ou encore Garde à vue qu’il te montre (notamment en résidence d’écriture à la Chartreuse)… Son récit No ou le pactole, développant une écriture scandée, à partir d’un groupe de personnes sans domicile fixe, est édité fin 2022 aux éditions de La lettre volée.

Toujours fascinée par des éléments sans évidence poétique, Rachel Cholz porte un intérêt aux « à-côtés » urbanistiques ou sociaux et aux ambivalences des champs lexicaux qui les définissent.

« Le monde est de plus en plus scindé par ses contextes. Les spécificités s’accumulant, il y a de moins en moins de poly- valences avec, je pense, une plus grande méconnaissance du monde de l’autre. Cela laisse davantage de place aux possibles, pour jouer avec les habitus, en les confrontant les uns aux autres. »

C’est ce qui l’intéresse aujourd’hui : s’amuser avec le protocole au-delà du cadre de l’écriture, en liant des personnes de différents milieux, afin de repenser l’ensemble des espaces de représentation.

En 2020, Rachel Cholz se lance dans le projet d’écriture hybride multimédiatique Viens Valeur. Ce dernier découle du développement de l’ASMR* sur les réseaux sociaux (et notamment YouTube), que l’artiste veut interroger suivant deux axes : le fétichisme des objets en tant que possibles sonores (ainsi que leurs décalages sémiotiques), et la mise en réseau de l’image. Après plusieurs résidences (Le Château Éphémère/ Fr, iMal/Be, Fabrique de théâtre/Be, Villa la Brugère/Fr), le projet a reçu une aide à la production de la Fédération Wallonie-Bruxelles (commission arts numériques) et est accompagné par Transcultures (Be) et les Pépinières Européennes de Création (Fr) pour les années 2022 et 2023. Une première étape a été montrée lors de l’exposition Sweet B.I.O.S au POELP (Bruxelles) de novembre à décembre 2022.

Rencontre entre Rachel M. Cholz et Jacques Urbanska,
Bruxelles – décembre 2022 …

A Lire dans Turbulences Vidéo #118

CHRONIQUES EN MOUVEMENT

  • Godard, dieu du cinéma, prophète de la vidéo, par Jean-Paul Fargier – p.8
  • Jean-Luc Godard, poète jusqu’au bout des doigts, par Marc Mercier – p.16
  • Impressions soleil couchant…, par Jean-Paul Fargier – p.26
  • Alger/Casablanca, le grand sud des arts vidéo, par Marc Mercier – p.30
  • Les corps si oui des Corsino, par Jean-Paul Fargier – p.42
  • Retour sur une expérience curatoriale, par Gabriel Soucheyre – p.46
  • Au-dessous comme au-dessus, par Gabrielė Arlauskaitė – p.50
  • L’art à la limite de la perception, par Tomas Pabedinskas – p.56
  • La création sonore en zone libre, propos recueillis par Philippe Franck – 64

PORTRAIT D’ARTISTE : ANNE-SARAH LE MEUR

  • Entretien avec Anne-Sarah Le Meur, propos recueillis par Gabriel Soucheyre – p.76 Au creux de l’obscur, par Anne-Sarah Le Meur – p.82
  • Corps, nombre, lumière, par Anne-Sarah Le Meur – p.90
  • Anne-Sarah Le Meur peinture programmée, par Jean-Jacques Gay – p.98
  • Portrait vidéo : Anne-Sarah Le Meur, par Gabriel Soucheyre – p.100

SUR LE FOND

  • Severance, Dissociation, par Alain Bourges – p.102
  • Entre-espaces et dispositifs hypermédia, propos recueillis par Philippe Franck – p.106
  • Félix Côte, aux sources des fossiles numériques, propos recueillis par Maxence Grugier – p.114
  • Un art du camouflage, à propos de quelques cas de détournement, par Gilbert Pons – p.122
  • Rachel M. Cholz, propos recueillis par Jacques Urbanska – p.132
  • La chimie sonore de Mathilde Schoenauer Sebag, propos recueillis par Jacques Urbanska – p.144

LES ŒUVRES EN SCÈNE

  • L’Arbre et ses rhizomes vidéographiques de Sivan Eldar, par Geneviève Charras – p.152

SUPPLÉMENT

  • Lockdown Publishing : Les boucles de l’archeiropoièse, par Stéphane Troiscarrés – p.154

Infos

Production

  • Videoformes
  • Article : avec le soutien de Transcultures et des Pépinières Européennes de Création
  • Visuel banner : Sandra ASMR (printscreen) – projet Viens Valeur (Rachel M. Cholz)
  • videoformes.com/magazine